Nouvelle Societe

15-06-09

256 Un mauvais moment…

J’ai dit souvent récemment, sur mon blogue et ailleurs, que je suis bien satisfait de la façon dont l’Éstablishment américain est à réaliser sa conversion, d’un système capitaliste générateur de trop d’inégalités, vers un système plus paternaliste dont c’est la mission d’Obama de réaliser la mise en place sans effusion de sang.

Quand je dis satisfait, cependant, comprenons bien, que c’est la satisfaction d’un malade en phase terminale qui approuve les arrangements qu’on a fait pour ses obsèques. J’aime la créativité, l’initiative dans l’effort, la liberté d’expression et j’ai passé la plus grande partie de ma vie à fraterniser avec d’autres cultures. Pour ceux qui ont ces idéaux, il y aura un mauvais moment à passer.

Ce n’est pas de gaieté de cœur que je constate que le monde DOIT aller vers un forme de collectivisation, de normalisation, d’enrégimentement, accompagné pour chacun d’un repli sur ses valeurs et ses frontières. Cette orientation m’attriste, mais je l’accepte, car je la vois absolument nécessaire : il n’y a pas d’autre moyen de corriger le mauvais virage que notre civilisation a pris il y a 60 ans.

On aurait pu, il y a 60 ans, prendre un autre virage. Au lieu de la Guerre Froide avec l’URSS, on aurait pu accepter, à la dimension de tout l’Occident, une lente évolution vers un plus grande présence de l’État dans la société, jointe à un respect des droits acquis et d’un nécessaire esprit d’entreprise. On aurait pu choisir de permettre de raisonnables inégalités, tout en faisant barrage à la misère.

Barrage à la misère que nous avions laissée s’installer chez-nous et aussi à celle que nous avions contribué à créer chez les autres. Au lieu de cette décolonisation sauvage qui a transformé les esclaves en serfs, libres surtout de se cannibaliser sous peine de mourir de faim, l’Occident aurait pu assumer la responsabilité de conduire à l’autosuffisance et à une autogouvernance efficace les peuples dont nos prédations avaient interrompu le développement. Si, au lieu d’un Rideau de fer, on avait bâti des ponts entre l’Est et l’Ouest, on aurait pu aussi en créer entre le Nord et le Sud.

Mais on ne l’a pas fait. On a choisi l’antagonisme. On a suivi, dans le monde dit « libre », l’attachement à courte vue à un néoliberalisme en forme de martingale pyramidale, ne pouvant survivre que par une création de richesse fictive dont l’irréalité serait tôt ou tard découverte. Dans le monde des république dites « démocratiques », on a suivi l’attachement doctrinal à des recettes que l’avènement de l’abondance rendait désuètes et à des politiques coercitives fatales à la liberté et à la créativité.

Est et Ouest se sont enlacés comme les scorpions dans la bouteille, dans un conflit qui a perduré jusqu’à la chute du Mur de Berlin. Lorsqu’il est tombé, on s’est aperçu qu’étaient morts non seulement le «socialisme», qui aurait pu donner un idéal à l’humanité – pour dérisoire qu’on ait pu le juger – mais aussi le « capitalisme », déshonoré par le mal qu’il avait causé et qu’on n’attendait pour enterrer que la découverte de la supercherie de cette richesse factice dont il avait voulu faire une raison de vivre.

Le voile est tombé en octobre dernier, quand l’argent a perdu toute valeur. Nous sommes désormais dans un monde où il n’y a plus d’idéal politique crédible, ni de symboles financiers auxquels on puisse accorder confiance. Nous sommes dans une situation où il faudra rebâtir la société, tout en réglant au jour le jour des questions de survie. Il va falloir mettre en mouvement concerté une population désabusée.

On ne pourra le faire que si des directives cohérente sont données et suivies, ce qui ne sera possible que si la population est dirigée avec fermeté et qu’on ne lui laisse que bien peu de discrétion pour s’en écarter. Des gouvernement autoritaires vont donc se mettre en place, refermés sans doute sur des zones identitaires culturelles que leur homogénéité rendra plus faciles à gérer.

J’ai bien peur que la démocratie, déjà bien malade, ne parte en vacance pour la durée des travaux. Elle reviendra, car la liberté est le système par défaut, dans le monde d’interdépendance qui est à se créer et qui ne pourra vraiment fonctionner que par consensus. Elle reviendra, et ceux qui l’accueilleront à son retour vivront une vie meilleure dans un monde meilleur.

Il n’y en aura pas moins un moment à passer où les choses et les idées que nous aimons ne seront peut-être pas là… Un mauvais moment à passer, mais il sera moins long si nous gardons la volonté inchangée d’œuvrer pour l’avenir auquel nous croyons.

Pierre JC Allard

29-05-09

Trois pas vers un monde nouveau

Je  n’avais pas prévu cet article.  Je ne viens pas sur le web pour donner le cour d’initiation 101 à la réalité politique, ni même pour informer. Je viens partager mes interprétations et analyses avec celles d’autres dont je présume qu’ils connaissent eux aussi les faits de base. J’ai comparé ailleurs mes interventions à ce qui se discute autour d’un porto, entre gens qui s’intéressent au monde.

Ici, je fais une exception, parce qu’au hasard d’un commentaire sur Agoravox j’ai compris qu’il fallait un rappel. Ça facilitera les débats subséquents.  Je me réfère ici à des articles passés. Mes excuses à ceux qui les ont lus.

D’abord, je voudrais rappeler un fait de base que personne ne conteste vraiment.  Il y a aux USA une classe sociale assez floue d’où est issu ce qu’on nomme l’Establishment. C’est cet Establishment qui contrôle la politique, l’économie et surtout les médias. Il ne faut pas en conclure, toutefois, que ce contrôle vise nécessairement à réaliser de sombres complots. D’abord, il n’est pas monolithique, il est seulement une arène réservée pour des combats musclés entre titans.

Elitiste, oui, mais uni « contre le peuple », non. L’Establishment  se manifeste donc – pas toujours, mais le plus souvent – par des mesures visant le bien des USA… tels que le conçoivent ceux qui y ont la majorité.  Le pouvoir y fluctue et donc les choses changent.  Aujourd’hui, bien des choses changent.

On peut penser que c’est Obama qui les fait changer, mais Obama ne serait jamais devenu Président des USA sans l’appui de l’Establishment. C’est donc une erreur de le voir en conflit avec cette classe sociale. Une autre erreur de penser qu’ il « flip flop » ( change d’avis, pour un oui pour un non, en prenant son café du matin). Ce que fait Obama est programmé depuis longtemps et est l’expression de ce que veut l’Establishment .

Tout le changement que l’on voit aux USA est donc  la manifestation d’une nouvelle « vision du monde »  de cet Establishment qui a compris que les choses ont changé et qu’il faut mettre en place une nouvelle société.  Le mandat d’Obama est d’y parvenir avec pas – ou peu – de sang dans les rues.   Le changement procède en trois (3) étapes.

La première, c’est la reprise en main de l’économique par le politique.   La crise va envoyer à la casse toutes les fortunes sauf les plus colossales, lesquelles sont déjà cooptées dans une nouvelle structure du pouvoir. L’argent ne sera plus la cause, mais la conséquence de l’accession au pouvoir. En ce sens, c’est la fin du capitalisme, que nous connaissons depuis la révolution industrielle.

La deuxième, c’est le transfert aux travailleurs du contrôle de la production industrielle. La compétence remplace le capital fixe comme facteur prioritaire de la production. La troisième, c’est une redéfinition de la démocratie, car celle que nous avons ne donne plus le change et ne joue plus son rôle.  Cette évolution en trois (3) points ne se discute pas tellement, il suffit de lire les journaux.

Ce qui reste bien ouvert à discussions, ce sont les péripéties qui marqueront ces changements et quelques faits divers qui auront une grande portée symbolique. La dématerialisation complète de la monnaie et l’instauration d’un régime de travail-revenu garanti par exemple.

Aussi, il faudra voir si, pour laver l’image des USA à l’interne et à l’externe, Bush et ses comparses seront mis en accusation. N’éliminons aucune hypothèse au départ. Si on a besoin d’un sacrifice humain, Bush pourrait être jugé dans un état où il y a encore la peine de mort !  L’important, cependant, c’est que le monde est à changer comme il n’a pas changé depuis les grandes révolution de la fin du XVIIIe siècle.

Pierre JC Allard

18-05-09

« The One » et l’imperfection programmée

Obama, dont le premiers geste avait été de bannir la torture et les tribunaux d’exception de Guantanamo, a rapidement ensuite pris position pour s’opposer aux poursuites contre ceux qui ont torturé et fait torturer. Il vient, il y a quelques jours de refuser la publication d’un énorme dossier de photographies qui auraient montré encore plus clairement la pleine étendue des sévices commis contre les prisonniers et souligné l’odieux de la guerre américaine en Irak. Il en rajoute encore, finalement, en remettant maintenant en services ces tribunaux militaires dont il avait ordonné la suppression ! Que se passe-t-il ?

Il est important de le comprendre, car c’est de ça que va dépendre l’opinion mondiale… et c’est de cette opinion mondiale que va dépendre le sort de l’Occident. On veut croire que les USA ont changé. On VEUT croire, en Europe, qu’il y a eu une Amérique de Bush, honnie et méprisée parce qu’elle était ignoble, mais qu’un nouvelle Amérique est arrivée, avec Obama, qu’on peut recommencer à respecter et à aimer.

On veut le croire, parce que si la fracture n’est pas réparée entre Europe et Amérique, notre civilisation ne sera plus le phare, mais la lanterne. Mais il faut que le changement annoncé soit crédible… Pourquoi, donc, cette volte-face qui risque de clore la lune de miel et de recréer l’antagonisme des dernières années?

Le scénario le plus simple est qu’Obama ait changé d’avis… mais Obama est parfait. Il est « The One », nous a dit Oprah dès le départ, en référence au film Matrix, ce qui en fait plus qu’un messie, car le héros de Matrix ne se contente pas d’apporter une solution, il dissipe l’illusion et fait disparaître le problème… Le film ne nous dit jamais quelle providence nous envoie ce sauveur, mais, dans le monde réel, ce ne peut être que l’Establishment financier, puisqu’il n’y a simplement pas de pouvoir alternatif sur la planète d’ou Obama pourrait être issu… et il n’y a pas de génération spontanée.

Créature de l’Establishment, Obama a sans doute été créé sur mesure, choisi parmi des milliers de candidats, après des études et des sondages poussés, pour venir transformer un système dont on avait tiré tout ce qu’il pouvait donner. Il n’y a rien dans l’image d’Obama, son discours, son comportement qui n’ait été rendu aussi parfait que le permettent les techniques dont on dispose aujourd’hui.

Or on n’est plus aujourd’hui dans la préhistoire de la manipulation, avec Bernays, Tchakotin et Goebbels. On a créé « The One » et on l’a vendu à la population comme le produit miracle, y mettant financièrement tout ce qu’il fallait, éliminant de sa route tous les obstacles et lui donnant finalement comme adversaire un vieillard peu charismatique assisté d’une colistière caricaturale.

Il a gagné, bien sûr. Il a gagné et un plan se déroule dont il est bien difficile de croire qu’il n’ait pas été minutieusement préparé de longue date. Mais si cette volte-face fait partie du plan, à quoi sert-elle ? Le plus probable est qu’elle est là pour souder l’Amérique en un tout plus solide, en mettant Obama dans un rôle d’arbitre entre les factions libérales et conservatrices de l’Amérique.

Ceux qui veulent la punition des tortionnaires, la publication des photos, et la fermeture de Guantanamo vont sortir de la complaisance où les a faits tomber l’élection d’Obama et remonter aux barricades. Ils obtiendront tout ce qu’ils veulent, puisque cette élection a prouvé qu’ils étaient majoritaires, que le Congrès se fera leur porte parole et que les tribunaux suivront le nouveau vent qui se lève…

Ils l’obtiendront, mais Obama apparaitra comme l’homme du centre. A son corps défendant (!), il aura permis que la démocratie juge les auteurs des exactions – pas les petits, les grands – mais il aura été le protecteur impartial de ceux de la vieille garde…

Les photos qui n’ont pas été publiées pourront plus facilement être versées aux dossiers. Les tribunaux militaires trouveront quelques coupables qu’on punira et quelques innocents qu’on dédommagera…. puis Guantanamo fermera de consensus, puisque son travail n’aura pas été interrompu, mais terminé avec succès.

La Droite verra Obama comme un juste; c’est ce qu’elle respecte. Des que justice aura été faite, la Gauche ne lui ne reprochera plus ses volte-faces. Il aura hésité, mais il en sera arrivé à la bonne décision. La Gauche le verra un peu hésitant, « imparfait », plus humain… c’est ce qu’elle aime.

La perfection, ça se construit… et ça s’entretient.

Pierre JC Allard

08-05-09

L’ultime forfaiture du Capital

 Un dur coup, hier pour les « anticomplotistes ». Le Center for Public Integrity (CPI), par la voix de son directeur Bill Buzenberg, annonce que les banques qui prétendaient avoir été prises par surprises par la crise des surprimes qui a déclenché la faillite du système financier ont tout fait pour la provoquer, en facilitant des prêts à très haut risque dont on ne pouvait raisonnablement s’attendre à ce qu’ils soient remboursés.

Le CPI  met carrément la faute sur les agissements de 25 institutions financières.  Ces institutions ont consenti à elles seules 72% du total des mauvais prêts hypothécaires. UN TRILLLION  (USD$ 1 000 000 000 000 ) Des 25 institutions mises en cause, 21 appartiennent ou sont financées par l’une ou l’autre des banques que le Trésor américain inonde actuellement de milliards pour tenter en vain de les rescaper (bail out) aux frais des contribuables.

Parmi les incriminées, Citigroup, HSBC, Barclays… tout le gratin du capitalisme. AIG, en particulier, à qui le Trésor américain , depuis le plan Paulson, a aussi donné directement 180 milliards de dollars (dont une parcelle a servi a payer des boni et à organiser une nouba pour ses agents… !) Toutes les autres escroqueries financières de l’Histoire apparaissent tout à coup comme des peccadilles. ON A SCIEMMENT DÉTRUIT LE SYSTÈME FINANCIER MONDIAL.  

 Le cynisme de toute cette opération laisse pantois, car ce sabotage ne peut avoir eu lieu qu’avec la connivence du gouvernement des USA et au su de tous les gouvernements de quelques importance participant à la structure financière qui gère cette planète. L’élite qui dirige le monde nous a trahi et est partie avec la caisse.

Cette étude a été publiée alors que la Chambre des représentants américaine devait approuver hier un projet de loi visant à créer une commission d’enquête indépendante pour examiner les causes de la crise économique.  On avoue juste avant d’être démasqué. Les rats quittent la cale du navire qui sombre.

Que vaut cette information ? L’étude du CPI a porté sur 7,2 millions de prêts consentis entre 2005 et 2007.  Un échantillon significatif. Une conclusion irréfutable.

Que vaut la parole du CPI ?  il suffit de voir la liste des organismes qui le soutiennent depuis sa création, il y a 20 ans, pour voir qu’on n’a pas ici des anarchistes barbus, mais la fleur de l’Establishment.  Ce sont des capitalistes qui dénoncent. C’est une guerre civile au sein du Systéme dont je dis depuis  20 ans que c’est le seul événement qui nous en délivrera.

Jubilation ?  Ne pavoisez pas trop.  Il est clair que l’argent ne sera plus l’outil privilégie de la gouvernance, mais rien ne garantit que les nouveaux moyens qu’utilisera le pouvoir pour dominer seront plus justes, ni surtout plus démocratiques. Au contraire…  Souhaitons-nous une gouvernance bienveillante, car le paternalisme n’est pas le pire des dangers qui nous menacera.

 

Pierre JC Allard

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